dimanche 27 novembre 2011

Fermeture des travaux. Ouverture à la vie

Symbolisme du rituel de fermeture en loge maçonnique par Alain Pozarnik, collection Bibliothèque de la Franc-maçonnerie, Editions Dervy.

En 1991, Alain Pozarnik nous avait offert, déjà chez Dervy, un très pertinent Mystères et actions du rituel d’ouverture en Loge maçonnique. Vingt ans se sont passés pour que les travaux se ferment sur cette « ouverture sur la vie ». Le texte a une nature testamentaire soit, du point de vue traditionnel, une récapitulation opérative qui prépare à un jaillissement de l’esprit.

Dans une introduction où Alain Pozarnik fait peser tout le poids du mot « fraternité », il rappelle la primauté de l’initiatique.

Le livre porte le sceau de la bienveillance et de la bienfaisance, cette forme si particulière d’opérativité que confèrent l’expérience et la sagesse.

D’emblée, Alain Pozarnik distingue la fonction initiatique du rituel d’ouverture et celle du rituel de fermeture :

« Le Rituel d’ouverture saisit l’homme dans son état ordinaire pour le conduire à son état le plus élevé possible d’humanitude spirituelle. »

Et de noter le caractère gradualiste de ce cheminement.

« Le parcours du Rituel de fermeture des travaux est fondamentalement différent. Il présuppose que le franc-maçon ait atteint dans le temple son souffle intérieur et lui propose une conduite à tenir dans la vie quotidienne à venir pour conserver cette conscience impalpable, la laisser vivre dans les inéluctables mouvements de la vie profane et affirmer son existence dans les situations les plus simples comme les plus difficiles. »

Il ne s’agit donc pas de retourner au profane mais de demeurer dans la conscience accrue du temps sacré au sein même du profane jusqu’à abolir cette opposition entre sacré et profane. Alain Pozarnik identifie pleinement la fonction même de l’initiation, se rapprocher de soi-même, reconnaître sa propre nature originelle et ultime. Cette reconnaissance, à laquelle invite le rituel d’ouverture, doit peu à peu s’installer définitivement en toute circonstance.

« Il s’agit d’un rapport entre l’exercice ascétique ciblé dans le temps de la Tenue et son «après» ciblé dans l’espace de vie, entre la lumière et l’ombre du pavé mosaïque, entre le silence de l’Être et l’’agitation de l’ego. Ce rapport va définir la réalité du passage entre les limites de notre vie d’homme-animal et son basculement dans l’espace profondément humain en nous faisant reconnaître le passage par un parcours inversé. Nous allons passer de la sacralité à l’ordinaire pour savoir revenir dans ce monde ordinaire vers la sacralité.

La lumière du plein midi ne dure pas longtemps mais elle peut féconder nos ombres afin qu’elles ne soient pas complètement dans les ténèbres et possèdent un double sens. »

Il n’existe pas des objets initiatiques (le temple) et des objets non-initiatiques. C’est nous qui créons des rapports initiatiques ou non initiatiques avec l’objet. Ce point est essentiel à l’initiation :

« Ceux qui sont restés profanes durant la Tenue peuvent éprouver des difficultés à suivre les préceptes du Rituel de fermeture qui tente de les éclairer en urgence pour qu’ils puissent faire vivre leurs qualités de franc-maçon à travers leurs comportements journaliers. »

Au fil de l’ouvrage, Alain Pozarnik analyse de manière approfondie les fonctions et les opérativités en jeu lors de la fermeture des travaux à travers les gestes et propos du Vénérable Maître et des premier et second surveillants, en suivant la chronologie du rituel, un rituel qui conduit à une ouverture autre au monde, dans un nouveau rapport pour un nouvel homme.

« Et si le Rituel de fermeture était une sortie vers le monde quotidien et le quotidien de ce monde une sortie vers un monde autre… un monde de conscience subtile, un monde de l’esprit ? »

A travers la dialectique ouverture / fermeture, c’est bien celle, à la fois plus sourde et plus lumineuse selon notre état de conscience, diluée ou accrue, de la vie et de la mort qui se dessine derrière l’apparence, une dialectique destinée à nous faire saisir la permanence de l’Être.

« L’initié en quête de sagesse connaît la chorégraphie des lois du monde, se marie avec elles, y existe avec justesse, enfante un homme nouveau et espère, par petites étapes successives, se prolonger par un fonctionnement autre, répondant à un autre appel que celui de l’ego. »

Alain Pozarnik aura, une fois de plus, invité à la liberté de l’esprit, à la Voie de la Connaissance. Il démontre aussi que, même si presque tout nous conduit parfois à en douter, la Franc-maçonnerie peut assumer pleinement la fonction initiatique.

Il conclut : « Bien que toutes les étapes soient nécessaires pour éveiller notre conscience, trouver, sous les gravats de la vie quotidienne égotiste, la dalle qui ouvre le chemin vers l’Être intérieur est probablement une des étapes la plus importante sur la voie initiatique du Rite Ecossais Ancien et Accepté. »

Editions Dervy, 19 rue Saint-Séverin, 75005 Paris, France.