dimanche 23 janvier 2011

Catharisme

Parce qu'il y eut des liens étroits entre certains acteurs de la scène martiniste du XXème siècle, comme Armand Toussaint, et les personnalités du catharisme, nous vous rappelons avec plaisir l'ouvrage essentiel Un Cathare au XXème siècle, Déodat Roché (1877-1978). Sa vie, son œuvre, sa pensée de José Dupré, Editions La Clavellerie, publié il y a juste dix ans, sur une personnalité exceptionnelle du catharisme, à qui nous devons non seulement le renouveau des études cathares, mais l’actuelle survivance d’un courant cathare, intellectuel et spirituel.

L’étude, très fouillée, et le témoignage de premier ordre de José Dupré, qui a collaboré longuement avec Déodat Roché, sont un apport indispensable à la compréhension du catharisme du XXème siècle.
Le beau portrait qu’il fait de l’homme permet au lecteur d’approcher un esprit fort, inconditionnel, d’une rare lucidité et d’une bonté discrète. Déodat Roché eut un parcours spirituel, initiatique, d’une grande richesse, depuis Sédir et ses « Amitiés spirituelles » jusqu’à l’anthroposophie de Steiner, passant par l’Eglise gnostique et la Franc-maçonnerie. Mais, on perçoit très tôt chez Déodat Roché un regard fixé sur l’au-delà des formes initiatiques, ce qui apparaîtra nettement quand il va fonder et développer les « Etudes Cathares » et de concrétisera à la fin de sa vie dans le recueillement et la solitude. L’ermite cathare, présent dès le début du chemin, une fois sa mission accomplie malgré les vicissitudes inhérentes à l’humanité, s’épanouira finalement pour faire de sa vie une œuvre en soi.
Mais à travers ce portrait, José Dupré veut dire ce qu’est le catharisme et ce qu’il n’est pas. Il combat pour que l’œuvre de Déodat Roché qui a incarné le catharisme demeure vivante et libre :

« Ces pages, nous confie-t-il, ne sont pas nées d’un choix délibéré, mais de la nécessité qui s’en fit ressentir, peu à peu, lors de réunions ou de conversations m’amenant à répondre à des questions, ou à donner des informations, au sujet de Déodat Roché et des « Etudes Cathares » qu’il fonda sous une triple forme :
1. Les Cahiers d’Eudes Cathares, revue trimestrielle, en janvier 1949.
2. Les Editions des Cahiers d’Etudes Cathares, publiant les livres de D. Roché.
3. La Société du Souvenir et des Etudes Cathares, fondée à Montségur en Ariège le dimanche 30 avril 1950. Elle donna naissance au Camp d’été de l’Estagnol en 1956.
Par ailleurs, l’oubli dans lequel, de divers côtés, on cherche à faire tomber l’œuvre de D. Roché dont les ouvrages, en cette fin de siècle, ont disparu des librairies, rend nécessaire de rappeler sa vie, ses épreuves et son œuvre, face à tous ceux qui veulent éliminer la compréhension spirituelle du Catharisme à laquelle il fit un apport essentiel. Cette occultation n’empêche pas, bien au contraire, d’exploiter sans le dire les fruits de son labeur. Obéissant au mot d’ordre d’un certain ministre « Nous devons faire de la culture une industrie rentable. » (Radio France-Inter, 4-10-1983), les agents de cette récupération travaillant à défigurer le Catharisme en un objet ambigu et curieux, ne dérangeant plus aucune institution, et réduit à n’être qu’un label utilisé pour la promotion commerciale.
En 2001, quarante ans se sont écoulés depuis que je fis la connaissance de Déodat Roché. Au fil de ces années, ma conviction s’est renforcée que l’essentiel du Catharisme n’est pas une doctrine, ni un folklore, à quoi nos contemporains tendent à le réduire mais, pour l’être humain, une manière de percevoir sa propre vie intérieure et l’univers sensible, une manière aussi de se comporter à l’égard de ces deux domaines, de concevoir leurs rapports et de reconnaître, avec respect qu’il sont des sources communes, avec lucidité qu’ils rencontrent des obstacles identiques. Il m’apparut aussi que cette manière d’être et de ressentir faisait tragiquement défaut aujourd’hui dans un monde où elle a été implacablement persécutée il y a plus de sept siècles, en Europe. »

Dix ans plus tard, l’urgence de rappeler l’œuvre, de porter loin et haut le message, de préserver le joyau traditionnel, n’a fait que grandir. Le travail de José Dupré, si nécessaire en 2001, se révèle indispensable en 2011.
La Clavellerie, 24650 Chancelade, Dordogne, France.

mercredi 12 janvier 2011

Joséphin Péladan

Joséphin Péladan et la Rose+Croix. Etude historique sur les courants initiatiques rosicruciens de la Belle Epoque autour du Sâr Péladan par Arnaud de l’Estoile, Editions Arqa.
La personnalité de Joséphin Péladan (1858-1918) est difficile à cerner et continuera de nous échapper. Cependant, ce livre dresse un beau portrait de l’homme, de l’artiste, de l’initié dans une époque particulièrement riche pour l’occultisme et l’initiation.
Arnaud de l’Estoile rend compte des relations difficiles du Sâr avec ses pairs, on pense bien sûr à Stanislas de Guaita et la célèbre « guerre des deux roses » et met en évidence une influence certaine, culturelle mais aussi initiatique, qui lui a heureusement survécu.
Nous retrouvons dans ces pages cette Rose-Croix de Toulouse dont on sait si peu. Son frère, Adrien, en détenait la filiation et il initia Joséphin. C’est cette initiation que revendiqua Péladan pour constituer son Ordre de la Rose-Croix Catholique du Temple et du Graal. Quelques filiations hermétistes rosicruciennes se sont maintenues confidentiellement dans des cercles familiaux élargis. Il est possible que les Péladan se soient inscrits dans l’un de ces courants. Joséphin Péladan, catholique peu catholique et hermétiste peu hermétiste, n’en a pas moins laissé dans ses écrits des indices très intéressants sur la connaissance des arcanes.
L’auteur pose la question « de savoir si le Sâr fut un réel initié Rose-Croix ou s’il a mis ses acquis en occultisme uniquement au service de son épopée romanesque et de sa propre gloire. ». C’est évidemment un faux problème, nul ne saurait juger de ce qu’il en est et il faut rappeler qu’à toutes les époques, certains initiés choisissent le tapage pour mieux se cacher. Nous ne suivrons pas non plus l’auteur quand il affirme que « c’est actuellement l’AMORC qui perpétue de façon la plus visible l’héritage de Péladan ». Si l’AMORC a, par opportunisme, relancé des Salons de la Rose-Croix qui n’ont que peu à voir avec l’esprit magnifiquement quichottesque qui animait le Sâr, on ne saurait trouver dans l’AMORC une continuité traditionnelle avec la Rose-Croix de Péladan comme d’ailleurs avec tout autre courant rosicrucien traditionnel. Rappelons que l’AMORC fut une création ex nihilo de Spencer Lewis sans lien avec les courants hermétistes Rose-Croix.
Toutefois, ce livre est intéressant par la synthèse qu’il propose sur un personnage clef de l’occultisme européen et par les documents, notamment l’iconographie, qu’il met à notre disposition dans une belle présentation.
Editions Arqa 29 bd Lise, 13012 Marseille, France.
www.editions-arqa.com/